Cette biographie a été rédigée par Hervé et adaptée au support
BERTRAND Charles Eugène
Préfailles
1884 - 1918
7ᵉ régiment d'infanterie
Mort pour la France
Charles est né le 8 janvier 1884 à Nantes.
Il est ajourné du service militaire deux fois pour "faiblesse".
Il se marie en 1909.
Il est mobilisé le 6 septembre 1914 au 65ème régiment d'infanterie de Nantes.
Charles passe au 91ème le 1er février 1915.
Il combat en Champagne. Son régiment subit de violentes attaques de l'ennemi.
Il passe au 120ème en septembre 1915.
Malade, il décède le 9 juin 1918 à l'hôpital de Saint-Germain-en-Laye.
Son père, Edouard BERTRAND, épouse Eugénie MORIN en 1873 à Nantes. Edouard est médaillé de la guerre de 1870. Ils exercent tous deux la profession de négociants en mercerie. Ils sont spécialisés dans la ganterie.
Le couple a deux enfants : Edouard né en 1873 et Charles né en 1884.
C’est au domicile de ses parents dans la rue Crébillon à Nantes, que naît Charles Eugene BERTRAND le 8 janvier 1884. Pour Charles , l’avenir est tout tracé. Il débute sa vie professionnelle comme commis dans la mercerie, avant de devenir à son tour négociant comme son frère aîné et son père avant lui.
Quand vient le temps du service militaire, Charles Bertrand est ajourné deux fois pour « faiblesse » en 1905 et 1906. Enfin, il est classé « service auxiliaire » en 1907.
Avant-guerre, les conscrits peuvent être ajournés ou libérés plus rapidement selon la situation de leur famille, leurs études ou s’ils résident à l’étranger. Les ajournés repassent chaque année devant le conseil de révision avec la classe suivante pour vérifier si la cause d’ajournement est toujours valide.
Le service auxiliaire intègre les hommes en moins bonne santé qui ne peuvent faire un service actif dans l’armée mais qui sont quand même soumis au service militaire. Ils peuvent être employés dans les hôpitaux, à la réparation du matériel, à la construction des bâtiments militaires, dans l’exploitation des voies ferrées ou des lignes télégraphiques .
Contrairement aux idées reçues, le service de santé n’est pas seul à recevoir des auxiliaires dans ses unités. Il y en a dans toutes les armes. Les auxiliaires sont affectés dans les dépôts et les magasins des régiments. C’est notamment le cas dans l'artillerie, le génie, le train et la cavalerie.
Nous ne savons rien concernant l’activité de Charles durant ses deux ans de service militaire en tant qu’ auxiliaire entre 1907 et 1909.
Sa vie professionnelle et familiale bascule après sa libération de ses obligations militaires. Il épouse en effet mademoiselle Juliette Angélique LANOE le 5 octobre 1909 à Nantes. Le père de la mariée est un industriel très connu de l’ameublement dans la région nantaise où il possède une usine de fabrication de meubles.
Charles occupe désormais les fonctions de négociant en meubles. Il quitte le domicile de ses parents au 11, rue d’Orléans pour résider désormais dans un immeuble cossu du 174, rue GIGANT à Nantes.
Toujours affecté dans la réserve au service auxiliaire, il est rappelé à l’activité le 6 septembre 1914, un peu plus d’un mois après la déclaration de la guerre, pour rejoindre le dépôt du 65ème régiment d’infanterie de Nantes.
Les pertes humaines de l’armée française sont si élevées qu’il s’avère nécessaire de recompléter au plus vite les effectifs des régiments décimés à l’issue de la bataille des frontières et de la bataille de la Marne. C’est ainsi que Charles Bertrand se retrouve classé « bon pour le service armé » par la commission de réforme de Nantes le 28 octobre 1914. Dès le 1er février 1915, il est muté pour recompléter les effectifs du 91ème RI (Mézières) .
Après les durs combats du début du conflit qui l’ont conduit à tenir le front d’Argonne depuis le début de l’hiver 1915, ce régiment est en cours de reformation à PASSAVANT dans le Doubs. Là, il se réentraîne en vue des actions offensives prévues pour le printemps 1915 par le général JOFFRE.
Après 35 jours à l’arrière du front, le régiment prend position en Champagne dans la nuit du 25 au 26 février 1915 pour se lancer à l’assaut des lignes allemandes. Du 7 au 13 mars, il repousse les contrattaques ennemies dans le secteur de Mesnil-les--Hurlus. Après quelques jours de repos, le 91ème s’installe dans la nuit du 4 au 5 avril de part et d’autre de la route de Verdun à Metz. Il doit participer à une offensive dite «de diversion » et enlever le village de Mazeray.
Cette attaque menée sans réelle préparation d’artillerie, se prolonge jusqu’au 6 avril et se termine par un échec cuisant. Pour preuve, le 3ème bataillon à lui seul a perdu les 2/3 de ses effectifs et les 6/7 de ses officiers. Le régiment est aussitôt relevé par le 120ème pour être reformé et recompléter ses effectifs dans le secteur de Verdun, alors qualifié de « calme »
C’est de ce secteur que Charles repart dès le 26 avril pour reconquérir le terrain perdu dans les Eparges à la suite d’une action offensive de l’adversaire. Les tranchées perdues sont reprises dès le 27 avril 1915 et Charles se verra nommé caporal sur le champ de bataille à la suite de cette action.
Le régiment est violemment attaqué dans la nuit du 12 au 13 juillet à 3h30. L’adversaire utilise toutes ses les armes les plus inédites et les plus puissantes de l’époque. Les tirs redoublent d’intensité à partir de 11h30. Des mines explosent sous les premières lignes françaises. Les lance-flammes et les gaz de combats allemands font des ravages parmi les défenseurs qui résistent pied à pied. La première ligne est submergée mais la seconde ligne résiste. L’assaut est définitivement stoppé vers 18h00. Les Allemands avaient prévu de progresser de 9km dans la matinée. A midi, ils n’ont gagné que 1200m. Mais le régiment est une nouvelle fois décimé. Il est relevé le 17 juillet et part se reformer aux Ilettes.
Le 91ème reste en Argonne jusqu’en août 1916. Charles ne vivra pas la suite de ces violents combats. Il est muté au 120ème de Stenay, le 24 septembre 1915.
Charles quitte définitivement les Eparges et le fameux ravin de la Mort le 26 septembre pour aller occuper le secteur du Bois-Haut, sur la tranchée de Calonne. Il y demeure jusqu’au 30 septembre, pour aller prendre un court repos à Sommedieue, où des renforts sont arrivés entre le 24 septembre et le 1er octobre. Charles fait partie des 464 hommes qui viennent recompléter les effectifs du régiment.
Le régiment se déplace peu après vers la zone de combat de la Champagne pouilleuse. Des attaques françaises suivies de contre-attaques allemandes, elles-mêmes suivies de d’attaques allemandes et de contre-attaques françaises vont se succéder durant tout le mois d’octobre 1915. Avec 130 soldats tués et près de 600 blessés, le régiment est relevé pour partir en réserve de division. Trois compagnies sont citées à l’ordre de l’armée. Il part dès la fin novembre pour aller se reconstituer dans la Meuse.
Le début de l’année 1916 voit le 120ème occuper le secteur de Troyon. Il attend le mois d’ avril 1916 pour rejoindre le front de Verdun et participer à son tour à la dantesque bataille. A la fin du mois, le régiment durement éprouvé est retiré de la ligne de front. Il part dans l’ Oise recompléter ses effectifs qui ont terriblement fondu. Plus de 1300 hommes officiers, sous-officiers et hommes du rang se présentent à l’appel, personnel récupéré et jeunes classes confondues. Le 120ème tient le front dans l’Oise jusqu’à fin juin 1916 avant de venir prendre position dans la Somme à la mi-juillet et participer à l’offensive franco-anglaise voulue par le général JOFFRE pour soulager le secteur de Verdun.
Les combats se terminent pour le régiment avec la prise du village de Berny en Santerre le 17 septembre. Devant l’ampleur des pertes subies, il est relevé à l’issue des combats dès le 18 juillet. Plus de 900 soldats manquent à l’appel, tués , blessés ou prisonniers.
Charles est quant à lui muté au 7e (régiment de Cahors) dès la fin des combats le 17 septembre 1916. Il rallie le secteur de la Woëvre que ce régiment occupe depuis la mi-juillet en semi repos après avoir perdu la moitié de ses effectifs durant la bataille de Verdun. Le séjour dans ce secteur qualifié de « calme » dure jusqu’en janvier 1917. Sur cette période, les poilus souffrent toutefois d’un problème chronique de ravitaillement en eau potable durant toute cette période.
Fin janvier 1917, le régiment embarque en chemin de fer à destination de la Champagne. Par étapes et séjours successifs, il finit par occuper un secteur à l’est de Reims. Enfin, le 16 avril, après une préparation d’artillerie qui a duré 4 jours, le 120ème est prêt à l’offensive. Le jour de cet assaut, et pour sa conduite, Charles est nommé sergent « au feu ». L’attaque française est un succès. Il sera nommé sergent fourrier dès le 26 avril suivant (Voir "Un soldat, un mot" au bas de cette biographie).
A ce poste, le sergent Bertrand remplit les fonctions d'un fourrier tout en accomplissant des fonctions d'agent de liaison (port et/ou déchiffrage de messages et/ou d'ordres d'un point à un autre). Lors des combats, il est aussi amené à prendre un fusil voire, dans de rares occasions, un pistolet pour combattre avec ses camarades.
Le 7ème quitte le front le 13 mai et part en repos pour un mois avant de rejoindre le secteur des Eparges de juin à septembre 1917, et de Verdun de septembre à avril 1918. C’est le 23 avril dans le secteur au sud d’ Amiens qu’il est déployé en urgence. Il s’agit de résister face au formidable assaut ennemi puissamment équipé avec du matériel ramené du front oriental qui a rompu les lignes anglaises en direction d’ Amiens et de Paris.
Il s’ensuit trois jours de combats défensifs acharnés durant lesquels le régiment perd 27 officiers et 1098 hommes de troupes. Mais cette défense héroïque a brisé le deuxième assaut allemand sur Amiens. Par la suite, les Allemands ne tentent plus aucun effort offensif dans ce secteur du front. Après ces formidables combats, le régiment, réduit à l’état squelettique, a besoin de se reconstituer. Il est envoyé à Campeaux où il reste jusqu’au 27 mai.
Après trois années de lutte au sein de régiments parmi les plus éprouvés de l’armée française, ce soldat qui a été ajourné deux fois pour « faiblesse » avant-guerre, est évacué comme malade le 15 mai 1918 pour cause de «maladie contractée en service ». Le sergent Charles Bertrand ne voit pas la fin des combats.
Il décède le 9 juin 1918 à l’hôpital mixte de Saint-Germain-en-Laye qui accueille des blessés civils et militaires.
Bien qu'étant Nantais, son nom est inscrit sur l'un des monuments aux morts de Préfailles. En effet, il y en a deux. Dans le cimetière communal, figurent uniquement les noms des Préfaillais morts pour la France. En bord de mer, un autre monument a été érigé comprenant deux plaques, l'une pour les Préfaillais, l'autre pour les "baigneurs" dont faisait partie Charles Bertrand. Etaient désignés comme "baigneurs" les propriétaires de résidences secondaires qui n'étaient pas présents toute l'année à Préfailles.
Son père l’a précédé dans la mort le 23 mai 1918 à Nantes.
Son épouse Juliette, restée veuve, décède le 5 octobre 1955 à Clisson à l’âge de 75 ans. Elle est inhumée au cimetière de la Miséricorde à Nantes.
Sources primaires et documentation
Ces sources fondamentales ont permis de vérifier et d'établir le récit de cette biographie.
Le sergent fourrier joue un rôle crucial mais souvent méconnu pendant la Première Guerre mondiale. C'est un sous-officier chargé de l’intendance et de l’administration courante d'une unité, notamment en ce qui concerne les vivres, l’habillement et la logistique de la troupe.
Il veille à la répartition des repas et à la bonne alimentation des hommes de sa compagnie. Il va chercher les rations journalières dans les dépôts de ravitaillement de l’armée.
Il tient à jour les listes des soldats (présents, blessés, tués, évacués). Il prépare les documents pour les soldes (paiement), permissions, affectations.
Il supervise la réception et la distribution de l’uniforme, des armes, des chaussures et autres matériels nécessaires.
Il contribue à l’organisation des déplacements, des cantonnements, des postes de garde, des corvées.
Il fait souvent le lien entre le commandement et les hommes du rang. Il fait souvent office de "secrétaire militaire", rédigeant rapports et lettres officielles. Il transmet les ordres, les affectations ou les informations venues du commandement.
Le sergent fourrier est sous les ordres directs du lieutenant ou capitaine de compagnie, mais joue un rôle central dans la logistique quotidienne.
Il est souvent choisi parmi les sous-officiers les plus fiables, rigoureux et méthodiques.
Le sergent fourrier n’est pas au front en permanence comme les fantassins, mais son rôle est essentiel au fonctionnement de l’unité. Sans lui, pas de nourriture, pas de vêtements secs, pas de munitions à temps, ni d’ordre bien transmis.